Union Locale CFDT Tricastin

Pas de consultation du CSE en cas d'inaptitude non professionnelle = licenciement injustifié

Pour la première fois à notre connaissance depuis la réforme issue de la loi Travail, la Cour de cassation se prononce sur la sanction encourue par l’employeur qui ne consulte pas le CSE dans le cadre d’une inaptitude d’origine non professionnelle. Le code du travail étant muet sur ce point, à l’inverse de l’inaptitude professionnelle, une décision des Hauts magistrats était attendue.

Obligation de consulter le CSE sur le reclassement
L’obligation pour l’employeur de consulter les représentants du personnel sur le reclassement en cas d’inaptitude non professionnelle résulte de la loi Travail de 2016 et est applicable depuis le 1er janvier 2017 (loi
2016-1088 du 8 août 2016, art. 102, JO du 9).
Avant cette date, elle était réservée aux cas d'inaptitude d'origine professionnelle.
Ainsi, depuis le 1er janvier 2017, les régimes sont unifiés et qu’il s’agisse d’une inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle, la consultation du CSE (auparavant des délégués du personnel) sur le reclassement du salarié est obligatoire (c. trav.
art. L. 1226-2 et L. 1226-10).
Une obligation qui n’a justement pas été respectée par l’employeur, dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation le 30 septembre 2020.
Un salarié avait été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail à l’issue d’un examen du 10 mars 2017, après quoi il avait été
licencié pour inaptitude non professionnelle.
Le salarié avait alors saisi les juges pour faire reconnaître son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il reprochait à l’employeur d’avoir manqué à son obligation de reclassement, faute d’avoir recueilli l’avis préalable des délégués du personnel.
Sa demande a été rejetée par la cour d’appel. Celle-ci a estimé que l’employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, malgré le défaut de consultation préalable des délégués du personnel. Elle ajoute que ce manquement n’a pas pour effet de rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le code du travail muet sur la sanction encourue en l’absence de consultation du CSE en cas d'inaptitude non professionnelle
Pour fonder sa décision, la cour d’appel s’en est tenue aux dispositions du code du travail.
Or celles-ci ne sanctionnent que le manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, laquelle inclut la consultation du CSE, en cas d’inaptitude professionnelle (c. trav.
art. L. 1226-15). Ce texte prévoit le versement au salarié d’une indemnité spécifique qui ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois (par renvoi à c. trav. art. L. 1235-3-1).
En revanche, le code du travail ne contient pas de dispositions similaires en cas d’inaptitude non professionnelle.
Dans le silence de loi, il fallait donc attendre une décision de la Cour de cassation pour connaître la sanction applicable.

Pour la Cour de cassation, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse
Avant de poser la solution, la Cour de cassation rappelle qu’en cas d’inaptitude non professionnelle, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie, notamment, de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2 du Code du travail. L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2 du Code du travail (c. trav.
art. L. 1226-2-1), lequel rappelons-le impose de consulter le CSE sur le reclassement.
La Cour de cassation en retire donc le principe suivant : « la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l’employeur de consulter les délégués du personnel (aujourd’hui le CSE),
prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ».
Les Hauts magistrats cassent l’arrêt de la cour d’appel et l’affaire devra être rejugée au regard de ce nouveau principe.
Notons que dans sa décision, la Cour de cassation considère, d’une manière générale, que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse en cas de non-respect par l’employeur des dispositions de l’article L. 1226-2 du code du travail fixant les modalités de reclassement du salarié.
Relevons également que la
sanction encourue n’est pas la même que celle applicable en cas d’inaptitude professionnelle.
En effet, en cas d’
inaptitude professionnelle, le salarié a droit à une indemnité d’au moins 6 mois de salaire, quelles que soient son ancienneté ou la taille de l’entreprise (c. trav. art. L. 1226-15 renvoyant à L. 1235-3-1).
En cas d’
inaptitude non professionnelle, c’est le barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse qui doit donc s’appliquer (c. trav. art. L. 1235-3).
Cass. soc. 30 septembre 2020, n° 19-11974 FSPBI https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/819_30_45527.html